5 tendances de l’alimentation bio en Europe à suivre en 2024

5 tendances de l’alimentation bio en Europe à suivre en 2024

Le monde du bio n’est plus un simple refuge pour les idéalistes ou les convaincus de la première heure. En Europe, il est désormais un laboratoire vivant où se croisent innovations technologiques, réflexions sociétales et dynamiques économiques. 2024 s’annonce comme une année charnière, où les lignes vont continuer de bouger. Dans les allées des salons Biofach à Nuremberg ou Natexpo à Paris, les indices s’accumulent : les tendances de l’alimentation biologique se font plus audacieuses, plus ancrées aussi dans les préoccupations environnementales et sanitaires. Voici cinq de ces tendances à suivre de près si vous travaillez – ou rêvez de travailler – dans le monde de l’agroalimentaire durable.

Des labels plus exigeants à la rescousse de la confiance

L’étiquette « bio » a longtemps suffi à rassurer. Mais face à la multiplication des labels, à la méfiance croissante des consommateurs et à l’exigence de transparence, 2024 marque un tournant vers une labellisation plus fine, plus robuste – voire plus radicale.

Des initiatives comme le label « Bio Cohérence » en France, ou le mouvement allemand « Bioland », misent sur un cahier des charges bien au-delà du règlement européen. En ligne de mire : la redéfinition du bio comme une philosophie globale, incluant bien-être animal, consommation locale, équité sociale et faible empreinte carbone.

Ces nouveaux labels renforcent la traçabilité via des outils numériques, parfois même en s’appuyant sur la blockchain pour garantir l’origine et les méthodes de production. Un exemple : l’entreprise suisse YukaBio, qui propose un QR code traçable de la graine à l’assiette. Le bio devient ainsi plus lisible, et surtout plus crédible.

Les protéines végétales entrent dans leur âge de maturité

On a beaucoup parlé de substituts carnés ces dernières années. Mais l’époque des steaks végétaux approximatifs semble déjà loin. En 2024, les protéines végétales biologiques ont gagné en raffinement, en qualité nutritionnelle et en diversité.

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Le pois chiche, la lentille et le chanvre restent des piliers, mais de nouveaux acteurs apparaissent – comme la féverole, la lupine ou le sorgho bio. Des startups comme la danoise GreenBean Origin développent des procédés doux – extraction à froid, fermentation naturelle – pour préserver les qualités organoleptiques et digestives des protéines.

Et si, hier encore, ces produits visaient surtout le fléau des régimes hypercarnés, ils répondent aujourd’hui à une attente plus large : manger mieux, avec moins de transformation, moins d’additifs, et toujours dans une logique d’autonomie alimentaire européenne.

Le bio à l’assaut des cantines et des entreprises

L’alimentation biologique n’a plus sa place uniquement dans les paniers des consommateurs avertis. Elle s’inscrit désormais au cœur des politiques publiques et des stratégies RSE des entreprises.

Avec la mise en œuvre croissante de la loi EGAlim en France – qui impose 20 % d’alimentation biologique dans la restauration collective – les cantines scolaires, les hôpitaux, mais aussi les cuisines d’entreprise basculent vers des approvisionnements plus durables.

À Barcelone, par exemple, le programme « Menja Sa » (mange sain) transforme les repas scolaires : 45 % des produits servis sont issus de l’agriculture biologique, avec un objectif de 70 % d’ici 2026. En parallèle, des startups comme la belge Luncheon proposent des plateaux-repas bio et zéro déchet pour les bureaux, sur abonnement hebdomadaire.

Ce basculement structurel s’accompagne d’un défi logistique : comment approvisionner en bio local tout un réseau de cuisines centrales ? Des coopératives agricoles et des plateformes comme AgriBioCollect en Italie s’organisent pour répondre à cette demande croissante.

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L’essor du vrac et du zéro déchet bio

Le bio ne peut plus ignorer l’autre pilier de la consommation responsable : la réduction des emballages. En 2024, l’un ne va plus sans l’autre. Exit les sachets plastifiés du rayon bio sur-marquetté : les consommateurs européens privilégient de plus en plus les produits en vrac, les bocaux consignés ou les emballages biodégradables.

En France, 64% des acheteurs bio se disent prêts à changer d’enseigne pour bénéficier d’une offre plus responsable en matière d’emballages (Baromètre Agence Bio 2023). Cela a poussé de nombreux distributeurs à revoir leur modèle.

Des enseignes comme Day by Day ou MuzéoVrac combinent offre 100 % bio et retour de la consigne. En ligne, des initiatives comme Loop développent des systèmes logistiques où les bocaux vides sont récupérés, nettoyés et réutilisés, dans une boucle fermée vertueuse.

Pour les PME comme pour les agriculteurs, le défi est de rationaliser ces circuits tout en conservant qualité et compétitivité. Une équation complexe, mais porteuse d’innovation.

Le retour de la souveraineté alimentaire bio : produire local, penser global

Avec les tensions géopolitiques, la crise énergétique et la montée des coûts de transport, l’année 2024 marque le réveil d’une notion plus que jamais stratégique : la souveraineté alimentaire. Elle s’impose aussi dans la filière bio qui, en Europe, dépendait encore trop de certaines importations – soja, fruits exotiques, épices…

Des programmes se mettent en place pour relocaliser des filières jusque-là peu présentes sur le continent. C’est le cas du quinoa en Bretagne, de l’ail noir bio en Macédoine, ou encore du gingembre bio en Andalousie, cultivé sous serre sans pesticides de synthèse.

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Mais attention : local ne doit pas rimer avec repli. Le bio européen pense global, en privilégiant les partenariats équitables avec les producteurs du Sud. On voit ainsi émerger des labels mixtes « bio + commerce équitable », qui rémunèrent correctement les petits producteurs tout en respectant les exigences européennes.

Cette dynamique s’appuie sur une mutualisation des acteurs : coopératives, syndicats agricoles, collectivités territoriales. En un mot, sur l’intelligence collective. Un exemple emblématique : le projet « Bio Local Sud », porté dans le sud de la France, réunit producteurs, transformateurs, distributeurs et restaurations collectives autour d’un objectif commun : nourrir le territoire, durablement, et en bio.

Une petite anecdote ici : lors du dernier Sommet International du Bio à Turin, un agriculteur italien racontait comment, après des années à livrer anonymement dans des centrales d’achat, il avait enfin replanté un verger de pommes anciennes, en agriculture biologique. Et qu’aujourd’hui, il vend ses fruits aux écoles de sa région. « Je les vois croquer mes fruits, s’amuser avec leurs trognons. C’est plus qu’une vente, c’est une transmission », confiait-il, visiblement ému.

Voilà peut-être une belle métaphore du bio de demain : une filière attachée à ses racines, mais tournée vers l’avenir. Une alimentation qui se veut à la fois savante et sensible, logique et locale, technique et affective. Et si 2024 était finalement l’année où le bio cesse d’être une niche, pour devenir une norme ?

Lea